LA LOI
SANTE N’EST PAS AMENDABLE
IL
FAUT UNE LOI-CADRE POUR UNE POLITIQUE DE SANTE
Répondre aux problèmes de santé aujourd’hui.
Si les maladies infectieuses ont diminué en France
comme dans le monde grâce aux progrès des sciences médicales, les maladies
chroniques ne cessent d’augmenter.
La France dispose d’un bon indicateur pour prendre la
mesure de l’épidémie de maladies chroniques, celle-ci est fournie par les
statistiques des affections de longue durée (ALD) du régime général de
l’Assurance Maladie qui couvre 90 % de la population française.
En 2009, les principales ALD concernent les affections
cardio-vasculaires (3,3 millions), les cancers (1,8 million), le diabète (1,8
million) et les affections psychiatriques de longue durée (1 million), soit 73
% de la totalité. L’évolution démographique ne peut expliquer cette situation.
En effet, si la population du régime général a progressé de 21 % entre 1990 et
2008, les affections cardio-vasculaires et cancers ont augmenté quatre fois
plus vite, et pour le diabète, cinq fois plus pour la même période.
Cinq
grands changements majeurs survenus au cours des dernières décennies expliquent cette épidémie de maladies
chroniques :
* La nourriture ultra-transformée et l’agriculture
productiviste ;
* Les inégalités sociales croissantes ;
* Le travail et le développement de son intensité ;
* La concentration urbaine et les pollutions qui en
découlent ;
* La contamination chimique généralisée (plastiques,
engrais, etc.).
Cette progression des pathologies chroniques concourent
aussi à l’accentuation des inégalités dans l’accès aux soins et à la
santé ainsi que la fracture entre catégorie sociale avec les différences
d’espérance de vie symbolisant les échecs de 40 années de politique de santé.
Cette situation est une atteinte à la démocratie et aux valeurs fondatrices de
notre République.
Cette
loi ne répond pas à cette situation et
s’inscrit dans la logique mortifère des précédentes.
La seule motivation de cette loi est d’envisager de
faire des économies en réduisant les dépenses de santé. Elle aggrave, par
certains côtés, la loi Bachelot notamment en renforçant la place et l’autorité
des ARS sans aucun contre-pouvoir. Elle impose la mise en place de groupements
hospitaliers de territoires (GHT). Cette mesure constitue un outil permettant
l’accélération des restructurations hospitalières, la désertification médicale
et le non accès aux soins pour des millions de familles tant des banlieues
abandonnées que des campagnes oubliées. Alors que les urgences ont frôlé la
catastrophe lors de la récente épidémie de grippe, les hôpitaux devraient
encore économiser 3 milliards d’euros, ce qui se traduirait par 22 000
suppressions d’emplois.
Pour
autant, nous ne suivons pas le mouvement des médecins libéraux.
Sous couvert d’un discours mettant en avant les
intérêts des patients, c’est bien ceux de professions corporatistes qui
motivent leur opposition à la loi, même si les généralistes sont dans une
situation très difficile qui justifie leurs demandes de revalorisation de leur
profession par rapport aux autres spécialistes.
En effet, quelle est la principale revendication ? Le
refus du tiers payant. Pour quelle raison ? Parce qu’alors le seul reste à
charge pour les patients sera les dépassements d’honoraires qui ont tendance à
se généraliser. Ainsi, les assurés sociaux, pour lesquels il est très difficile
aujourd’hui de s’y reconnaître dans un système très complexe, auraient une
connaissance immédiate de ces sommes qui vont directement dans la poche des
médecins et ils pourraient éventuellement en contester la légitimité.
La
mise en place du tiers payant généralisé sera aussi une formidable occasion de s’engager dans une simplification nécessaire du
système, gage de démocratie, de qualité et d’efficacité. Oui le temps médical
est si précieux qu’il ne doit pas se dissoudre dans de la gestion
administrative et suivi de comptabilité.
Ce qui impose un double flux de transmission des
informations du professionnel de santé vers la Sécurité sociale et les
complémentaires pour la demande de prise en charge du règlement à celui-ci. Dans
un deuxième temps, la Sécurité sociale informe le professionnel de santé, en
coordination avec les complémentaires, de l’ensemble des règlements effectués.
Même si la généralisation du tiers payant ne règle pas
les deux problèmes que sont la rémunération à l’acte et le désengagement de
l’Assurance maladie obligatoire au profit des assurances complémentaires, il
s’agit tout de même d’une mesure favorable aux assurés sociaux, au regard de ce
qui se passe depuis plusieurs années pour les médicaments.
Nous voulons une loi cadre pour une politique de
santé.
Celle-ci doit pouvoir répondre aux enjeux de
société, facteurs déterminants du développement des maladies chroniques et
d’accroissement des inégalités et de la double peine du monde ouvrier et
employés (plus d’années d’invalidité au sein d’une vie plus courte). Ces cent
dernières années, l’amélioration de la santé des populations est due à 80 % à
l’amélioration des conditions de vie et de travail et à 20 % au progrès de la
médecine. C’est bien cette dégradation récente qui pose problème et entraîne
cette augmentation des maladies chroniques.
Poursuivre dans cette logique économiste conduit à ce
paradoxe dramatique, plus les maladies chroniques augmentent, mieux les budgets
des hôpitaux se portent puisqu’ils sont évalués à l’activité.
Nous
ne séparons pas la prévention du soin. La définition de la santé par
l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), ce n’est pas seulement l’absence de
maladie mais un bien-être social psychologique et physique.
Les
réformes se sont succédées depuis plus de vingt ans sans apporter de réponses adaptées sur la base des
deux principes qui doivent, selon la CGT, fonder notre système de santé :
1. Une prise en charge des dépenses de soins et de
santé toujours mieux couvertes par la Sécurité sociale;
2. Un service public associant la médecine de ville et
l’hôpital pour une politique de réseau de santé au plus près des populations.
Pour cette raison, la CGT revendique une loi-cadre
rappelant les principes d’organisation et de financement de notre système de
santé, intégrant toutes ses composantes afin de s’engager résolument dans cette
reconquête d’une Sécurité sociale de haut niveau et dans le renversement
nécessaire de logique : le passage d’une politique du soin pour
l’essentiel porté par la réparation à une politique de santé tournée vers la
prévention, l’éducation et la promotion du travail et de la santé. Ainsi que la
prise en charge de l’autonomie mais aussi les questions du médicament et de
l’industrie pharmaceutique et de la recherche.
La
CGT, dans la préparation de son Congrès, va élaborer dans les mois à venir
cette loi-cadre qu’elle mettra en débat.